L'Histoire du 6eme : Le siècle d'or ! 4/6
Avec le XVIIe siècle, commence la période des grandes réalisations urbaines et monumentales.
L'achèvement du Pont-Neuf, qui apportait une voie de communication importante entre les deux rives de la Seine, permit l'ouverture de la rue Dauphine sur les terrains des Grands-Augustins et le lotissement du quartier compris entre cette rue et le mur de Philippe Auguste.
Au-delà du mur, là où la reine Margot avait bâti son éphémère palais, un groupe de financiers se partagea les terrains, et après avoir fait percer le quai Malaquais, ils le firent border d'hôtels splendides et reliés au palais des Tuileries par le pont Royal. Toutes ces constructions attirèrent, bien évidemment, une foule de gens qui s'établirent dans la censive de Saint-Germain-des-Prés.
Plus au nord, c'est à la reine Marie de Médicis que nous devons l'un des plus beaux palais de Paris, le Luxembourg. Après la mort d'Henri IV, la reine avait voulu se rapprocher de sa confidente Léonora Galigaï, qui habitait rue de Tournon, et, pour ce faire, acheta l'hôtel du duc de Luxembourg dont le jardin bordait le couvent des Chartreux. En véritable héritière des Médicis, elle fit dresser par l'architecte Salomon de Brosse, un palais à l'italienne dont les galeries furent ornées de peintures de Rubens, rappelant les principales scènes de la vie de la reine.
Marie de Médicis devait peu séjourner au Luxembourg ; installée dans sa demeure en 1625, elle dut la quitter après la " Journée des Dupes ", cinq ans plus tard, pour ne plus jamais y revenir.
Autre fleuron du quartier, l' église Saint-Sulpice : la vieille église était devenue insuffisante en raison de l'accroissement des fidèles. C'est l'architecte Daniel Gittard qui, en 1643, commença les travaux qui s'arrêtèrent, faute de crédits, en 1673, à la hauteur de la nef.
Dès le début de ce siècle de ferveur religieuse, les deux reines, Margot et Marie de Médicis, avaient attiré auprès d'elles les congrégations religieuses. Alors que la première installait les Petits-Augustins sur le quai Malaquais, la seconde logeait près du Petit Luxembourg, les Filles du Calvaire. En même temps, les Jésuites faisaient bâtir leur noviciat près de l'église Saint-Sulpice et les Carmes s'installaient rue de Vaugirard.
Tout comme Richelieu avait fait élever la chapelle de la Sorbonne, Mazarin créa le collège des Quatre-Nations dans lequel devaient être élevés et instruits gratuitement " les jeunes gentilshommes originaires des pays cédés à la couronne par les traités de Munster et des Pyrénées ". L'emplacement choisi fut celui de l'ancien hôtel de Nesle dont ne subsistait que la tour, et l'architecte Louis Le Vau dressa avec une remarquable adresse un bâtiment demi-circulaire fermé à ses extrémités par deux pavillons qui coupaient avec élégance la courbe de l'ensemble. La chapelle fut ornée du mausolée de Mazarin sculpté par Coysevox, et l'aile orientale fut aménagée en bibliothèque pour recevoir la fabuleuse collection d'ouvrages formée par le cardinal. Mazarin ayant demandé, par testament, que la bibliothèque fut ouverte deux fois par semaine au public, il en fit la première bibliothèque publique de Paris.
Ainsi la vie religieuse et intellectuelle prit, au cours du XVIIe siècle, une extension remarquable dans l'arrondissement joignant définitivement l'influence religieuse de l'abbaye de Saint-Germain à l'influence intellectuelle de l'Université. Et, en cela, le comblement, au milieu du siècle des fossés de Nesle par la construction du collège des Quatre-Nations, est symbolique de l'union entre les deux parties de l'actuel arrondissement, jusque-là coupé par les murailles des fortifications.
Si la ferveur religieuse a marqué le XVIIe siècle, comment oublier tous les plaisirs profanes qui marquèrent l'évolution sociale de la population parisienne. Et, au premier rang de ceux-ci, la foire Saint-Germain qui, en un temps où le rythme de vie était essentiellement saisonnier, apportait une fois l'an son cortège de fêtes et de jeux divers.
C'est aussi dans l'actuel sixième arrondissement que fut, pour la première fois en France, joué un opéra-ballet : Pô moue, dont le succès fut tel que Lulli s'empressa d'acquérir le privilège de jouer des opéras, à son tour. Il n'hésita pas, pour ce faire, à chasser, en 1673, la troupe de Molière, dont l'illustre fondateur venait de mourir, de la salle du Palais-Royal. Ainsi chassée, la troupe élut domicile dans les murs de l'hôtel Guénégaud, où vint la rejoindre la troupe de l'hôtel de Bourgogne, en 1680. Jugés par la suite trop proches des étudiants du collège des Quatre-Nations, les comédiens durent, en 1687, s'en aller dans la rue Neuve-des-Fossés-Saint-Germain (actuelle rue de l'Ancienne-Comédie), où ils restèrent pendant près d'un siècle. Tout près d'eux vint s'installer un café qui devint le rendez-vous de tous les littérateurs du temps : le café Procope qui continue à vivre en dépit des siècles.
Temps de piété, temps de plaisirs, temps des grandes œuvres, le XVIIe siècle a marqué d'une empreinte profonde notre quartier, qui conserve de cette époque les fleurons de ses monuments et de ses souvenirs.